En 2011, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES), s’est autosaisie dans le cadre de sa mission de nutrivigilance, à la suite d’un cas d’alcalose métabolique sévère chez une enfant de 12 mois nourrie de façon exclusive par une boisson aux amandes.
Les conclusions de ce rapport (1) soulignent le risque de complications parfois graves de l’utilisation des boissons végétales chez le nourrisson, et ce d’autant que leur consommation est précoce, prolongée et exclusive ou prépondérante.
Les boissons végétales commercialisées en France ne portent pas la dénomination de vente « préparations pour nourrissons » ou « préparations de suite ». Elles ne sont donc pas soumises à la directive européenne encadrant la composition et l’étiquetage des préparations adaptées à la nutrition des nourrissons.
Ces boissons végétales peuvent être à base de soja, de légumineuses, d’oléagineux (amande, noisette, noix, etc.), de céréales (riz, avoine, etc.), de quinoa ou d’amarante. On peut aussi en rapprocher les laits de chèvre, de brebis, de jument ou d’ânesse, qui ne sont pas des préparations adaptées à l’alimentation du nourrisson. Ces boissons sont parfois enrichies en nutriments, en sucre, ou en différents arômes. L’ANSES a ainsi répertorié 211 boissons végétales sur le marché en 2011, boissons dont l’étiquetage relatif à leur consommation par des nourrissons est parfois ambigu.
Un article traitant des complications nutritionnelles de la consommation de ce type de produit chez le nourrisson a été publié dans les Archives de pédiatrie (2). Les observations de 9 enfants ayant présenté des complications imputables à la consommation de boissons végétales avant l’âge de 1 an ont été colligées dans 3 hôpitaux de l’est-parisien entre 2008 et 2011.
Les boissons consommées, parfois en association, étaient à base de riz, châtaigne, amande ou soja. Dans deux cas, les parents avaient donné cette boisson à leur enfant par conviction personnelle. Dans les sept autres cas, des troubles allergiques ou digestifs mineurs (eczéma, reflux gastro-œsophagien, « coliques ») étaient à l’origine de la consommation de ces boissons végétales. Un enfant a été pris en charge pour un état de mal convulsif lié à une hypocalcémie profonde. Les autres signes observés étaient : cassure pondérale avec ou sans cassure staturale, anémie parfois sévère, hypoalbuminémie et manifestations cutanées liées à une carence en zinc. Dans tous les cas, la reprise d’une alimentation adaptée après traitement symptomatique a permis une disparition des symptômes.
Les auteurs de cet article ont également fait une revue exhaustive des complications rapportées dans la littérature après consommation de boissons végétales inadaptées, le plus souvent à base de riz, d’amandes, de soja ou de châtaignes. De nombreux cas de kwashiorkor sont décrits, comme dans certaines rapportées dans l’article, de fréquents cas d’hypoalbuminémie, d’anémie sévère, de déficit en zinc et de retards de croissance. Ces observations soulignent les dangers d’une alimentation inadaptée chez le nourrisson qui peut mener à des complications graves. L’information des parents et la vigilance des professionnels de santé sur ce sujet sont primordiales.
À noter, qu’en cas d’intolérance voire d’allergie aux protéines de laits de vache, des laits infantiles à base d’hydrolysats de protéines de riz, vendus en pharmacie (à ne pas confondre avec le “lait de riz” que l’on trouve en grande surface qui est en réalité un jus végétal) sont une alternative.
POUR EN SAVOIR PLUS
1. Anses. Avis relatif aux risques liés à l’utilisation de boissons autres que le lait maternel et les substituts du lait maternel dans l’alimentation des nourrissons de la naissance à 1 an. Saisine n°2011-SA-0261.
2. Le Louer B et al. Conséquences nutritionnelles de l’utilisation de boissons végétales inadaptées chez les nourrissons de moins de 1 an. Archives de Pédiatrie 2014 ; 21 : 483-488.