Nutriments Revue #26

Les protéines sont des composants majeurs des tissus du corps humain et sont impliquées dans de très nombreuses fonctions biologiques. Les apports chez le nourrisson et l’enfant sont indispensables pour la maintenance et pour la croissance des nouveaux tissus. L’EFSA (European Food Safety Agency) définit les apports de référence pour les nourrissons et jeunes enfants.

Consommation protéique.nourrissons

Ces besoins vont dépendre de l’âge, du sexe et de la vitesse de croissance de l’individu. En plus de la quantité de protéines consommées, leur qualité n’est pas identique en fonction des types d’aliments. Ainsi, les protéines d’origine animale sont considérées comme des protéines de haute qualité car plus riches en acides aminés (AA) essentiels et plus facilement digestibles, alors que les protéines végétales sont de moindre qualité car contenant des quantités limitées de certains AA essentiels comme la lysine ou la méthionine. Par ailleurs, la consommation de produits d’origine animale permet un apport en vitamine B12, en fer et zinc plus important que les produits végétaux.

Un apport suffisant en protéines est donc déterminant pour la croissance mais un excès en protéines pourrait, à l’inverse, conduire à des pathologies métaboliques à long terme. Les effets délétères d’une consommation excessive prolongée en viande rouge notamment sont bien documentés chez l’adulte (augmentation du risque de cancer du côlon, de pathologies métaboliques, de diabète) mais moins claires chez l’enfant. En effet dans son avis, l’EFSA conclut que les données ne permettent pas d’établir une limite maximale de sécurité, même chez l’adulte.

Protéines : 95 % des nourrissons ont des apports protéiques supérieurs aux apports de référence

Les données de l’enquête transversale française Nutri-Bébé 2013 (plus de 1 100 nourrissons) ont été analysées par Chouraqui et al. pour évaluer les apports journaliers en protéines et le rapport protéines-énergie (E %) par groupe d’âge. Les quantités de chaque aliment consommé ont été enregistrées au travers d’un carnet de consommation sur 3 jours non consécutifs. Les données renseignées ont été validées/complétées lors d’un entretien en face à face, et le poids de l’enfant mesuré. Quel que soit l’âge, il apparait dans cette cohorte que 95 % des enfants étudiés ont des apports protéiques supérieurs à ceux attendus. Par ailleurs, il apparaît que la contribution des protéines dans l’apport énergétique global double entre les premiers mois et de vie et la deuxième année. Les auteurs notent par ailleurs une corrélation significative entre l’indice de poids corporel et la consommation de protéines, déterminant majeur du poids ultérieur.

Cependant, la consommation journalière en protéines a diminué dans le temps, en particulier chez le nourrisson de 7 mois, par rapport à 2005. Cela est vraisemblablement en lien avec la réduction des protéines dans les formules infantiles ces dernières années et l’introduction plus tardive d’aliments de diversification. Jusqu’à 11 mois, les protéines des formules infantiles constituent la majorité des protéines consommées. La viande n’est pas introduite avant 6 mois. Au cours de la deuxième année, les produits laitiers sont majoritaires, suivis des autres protéines d’origine animale (viande, œufs, poisson).

Protéines : des déséquilibres alimentaires importants, y compris in utéro

Des résultats proches de ceux rapportés par Chouraqui et al ont été publiés récemment par une équipe italienne. Dans leur étude, 389 mères ont répondu à un questionnaire alimentaire concernant leur enfant à 18 mois. De façon similaire à la cohorte française, plus de 95 % des nourrissons avaient des apports protéiques au-delà des apports de référence. De façon générale, les auteurs rapportent un déséquilibre alimentaire avec un excès d’apports en protéines, en acides gras saturés, en glucides et un défaut d’apport en acides gras polyinsaturés, en vitamine D, en fer et en fibres. Dans cette étude, les produits laitiers sont la source principale d’apports en protéines, suivis de la viande et des produits à base de céréales.

De façon intéressante, les auteurs notent que des déséquilibres importants dans l’alimentation peuvent être présents chez les mères lors de la grossesse ce qui pourrait avoir un impact dans le comportement futur des parents/nourrisson.

Protéines : suivi de la consommation alimentaire réelle utile  

Au total, on note dans les pays européens des apports protéiques supérieurs aux recommandations chez le nourrisson, malgré une réduction ces dernières années, suite à la diminution des protéines dans les formules infantiles et des meilleures prises en compte des recommandations officielles. Au-delà du possible impact d’un excès protéique à long terme, cet excès d’apport peut être le reflet d’un déséquilibre global de l’alimentation avec un défaut de consommation de fruits/légumes et d’acides gras polyinsaturés. Finalement, il est nécessaire de suivre la consommation alimentaire réelle des nourrissons qui va probablement continuer à évoluer.

RÉFÉRENCES
1.  Chouraqui JP, Darmaun D, Salmon-Legagneur A, Shamir R. Protein intake pattern in non-breastfed infants and toddlers: A survey in a nationally representative sample of French children. Clinical Nutrition 2022 ; 41 : 269e278.

2.  Concina F, Pani P, Carletti C et al. Dietary Intake of the Italian PHIME Infant Cohort: How We Are Getting Diet Wrong from as Early as Infancy. Nutrients 2021 ; 13 : 4430.