Diversification Revue #26

Les recommandations de diversification alimentaire des sociétés savantes et agences nationales sur l’alimentation s’intéressent à différents aspects :

- Quels types d’aliments proposer au nourrisson (légumes, viande, etc.) ?
- À quel moment proposer ces aliments ?
- Quelle méthode utiliser ?
- Quelle texture d’aliments en fonction de l’âge ?
- Quand introduire les aliments potentiellement allergisants ?

Aux États-Unis, la DGA (the Dietary Guidelines for Americans) recommande un allaitement maternel exclusif pendant 6 mois avant diversification alimentaire (alors qu’en Europe, les agences sanitaires recommandent de la débuter avant 6 mois (1), en France entre 4 mois révolus et 6 mois selon l’Anses (2)).

Pourtant, il existe une discordance entre les recommandations scientifiques et les pratiques comme l’indique la publication étudiée ici : seulement 25 % des nourrissons américains sont exclusivement allaités jusqu’à 6 mois et 20 % des parents commencent à diversifier avant 4 mois. C’est dans ce contexte que Dorsey Graf et al. se sont intéressés aux déterminants des choix maternels concernant la diversification alimentaire.

Les auteurs ont interrogé 27 mères américaines entre août et novembre 2019. Il s’agissait de mères âgées de 18 à 40 ans, de nourrissons et enfants en bas âge entre 6 et 19 mois, bien portants, nés au-delà de 36 semaines de grossesse (SG). Ces mères étaient recrutées par publicité (flyers, affiches dans des magasins, etc.). Les entretiens étaient semi-structurés avec des questions ouvertes, comme : « Qu’est-ce qui pour vous est le plus important pour commencer à proposer de la nourriture solide à votre enfant ? », « Quels problèmes avez-vous rencontré ? », etc.

Trois thèmes se sont dégagés des interviews : 1) le risque d’étouffement ; 2) les réactions allergiques ; 3) les quantités ingérées

Le risque d’étouffement

Plusieurs mères ont décrit des événements au cours desquels elles ont craint que leur enfant ne s’étouffe. Il ne s’agissait pas toujours de réels épisodes d’étouffement, mais parfois de simples toux. Plusieurs stratégies étaient alors mises en place : certaines attendaient que leur enfant ait des dents pour diversifier tandis que la plupart surveillaient attentivement leur enfant lors des repas. D’autres ont choisi de commencer les morceaux plus tardivement que conseillé. Paradoxalement, certaines mères proposaient des morceaux plus gros, pensant que les petits morceaux seraient plus à risque d’étouffement.

Les réactions allergiques

Beaucoup de mères craignaient les réactions allergiques en se demandant si leur enfant allait tolérer cet aliment. Certaines se focalisaient sur certaines catégories d’aliments et d’autres avaient ces peurs pour tous. De ce fait, certains aliments (poisson, beurre de cacahuètes, œufs, etc.) étaient donnés plus tard que recommandés/suggérés par leur pédiatre. À l’inverse, d’autres mères proposaient d’emblée ces aliments potentiellement allergisants pour savoir si leur enfant était allergique ou non. De façon générale, les mères se renseignaient beaucoup sur ce point par le biais d’internet et des réseaux.

Les quantités ingérées

Le troisième thème récurrent dans les interviews était la crainte que l’enfant ne mange pas assez et refuse certains aliments ou textures. Pour contrecarrer ce risque, des mères proposaient une large diversité d’aliments à leur nourrisson, et proscrivaient des aliments dits moins bons pour la santé car plus riches en sel, sucre ou plus gras. D’autres encourageaient leur enfant à manger seul et de façon générale les mères étaient conscientes des effets à long terme de l’alimentation du nourrisson sur la croissance (surpoids, obésité ou, au contraire, insuffisance pondérale).

Connaître les craintes pour les dépasser

Bien connaître les motivations et craintes des mères lors de la diversification est important car cela permet d’identifier les leviers / axes de sensibilisation qui permettraient d’éviter d’avoir un écart entre les recommandations scientifiques et les opinions/croyances des mères. De façon générale, le risque d’étouffement et les craintes d’allergie alimentaire préoccupent beaucoup les jeunes parents.

RÉFÉRENCES
 Dorsey Graf M, Lutenbacher M, Wasser H et al. Choking, allergic reactions, and pickiness: A qualitative study of maternal perceived threats and risk avoidance strategies during complementary feeding. Appetite 2022 ; 171 : 105914.
1.  https://efsa.onlinelibrary.wiley.com/doi/epdf/10.2903/j.efsa.2019.5780
2. https://www.anses.fr/fr/system/files/NUT2017SA0145.pdf