Diversification, Recommandations et réglementations Revue #13

Des enjeux pour la santé future de l’enfant

La diversification alimentaire correspond à l’introduction d’aliments autres que le lait chez un enfant allaité ou recevant une préparation pour nourrissons. L’enfant va peu à peu réduire sa consommation de lait (maternel ou préparation pour nourrissons) pour acquérir peu à peu les habitudes familiales. Ce moment est particulièrement important dans la vie d’un enfant, pour sa croissance et sa santé future.

Diversification et allergies alimentaires

Les conseils sur les modalités de la diversification alimentaire ont beaucoup changé en fonction de l’évolution de la société (accès facilité aux aliments, mondialisation, etc.) et de l’état des connaissances sur le sujet.

Ces recommandations ont été récemment revues : en France par le Comité de nutrition de la Société Française de Pédiatrie (SFP), en Italie par les Sociétés Italiennes de gastroentérologie, hépatologie et nutrition pédiatrique (SIGENP), et d’allergologie et immunologie pédiatrique (SIAIP), avec le concours de la Société Italienne de Nutrition Entérale et Parentérale (SINPE), et par la Société Européenne de Gastroentérologie, Hépatologie et Nutrition Pédiatrique (ESPGHAN) (1).

Devant l’augmentation de la prévalence de l’allergie alimentaire dans les pays industrialisés, il avait été recommandé dans les années 1990 d’introduire les aliments très allergisants chez les enfants à risque (ayant au moins un parent du 1er degré – père, mère, frère ou sœur – allergique) après l’âge de 12 mois, et même après 24 mois pour l’oeuf. Plusieurs études récentes ont montré que l’introduction tardive de ces aliments ne modifiait pas la prévalence de la maladie allergique et qu’elle pourrait même en augmenter le risque. À l’inverse, il a été constaté qu’une introduction des aliments après 4 mois était associée à moins d’allergies. Par ailleurs, la poursuite de l’allaitement maternel lors de la diversification était bénéfique sur le risque allergique.

Au total, les experts s’accordent pour conclure qu’il n’est pas utile de débuter la diversification après l’âge de 6 mois pour la prévention de l’allergie chez les enfants à risque. Mais cette introduction ne doit pas se faire avant l’âge de 4 mois. Plusieurs études récentes bien conduites se sont intéressées à l’impact de l’âge d’introduction du gluten sur le risque de maladie cœliaque. L’introduction du gluten entre 4 et 6 mois révolus n’a pas d’influence, positive ou négative, sur le risque ultérieur de maladie cœliaque. Quel que soit l’âge choisi pour l’introduction du gluten (jamais avant 4 mois), celle-ci doit être débutée par de faibles quantités.

Diversification, diabète et obésité

Concernant le risque de diabète de type 1 et la diversification, quelques données non formellement validées ont montré l’effet négatif d’une introduction au cours du 4e mois de vie du lait de vache, de fruits et de jus de fruits et l’effet bénéfique de l’allaitement maternel (2).

Les excès d’apports énergétique et protéique (lait, viande, fromage) sont des facteurs de risque reconnus d’obésité ultérieure (3). La consommation de boissons types jus de fruits, jus végétaux ou boissons sucrées est fortement déconseillée avant l’âge de 1 an, car elles constituent un apport calorique excessif (cf. ci-dessous). De plus, il est déconseillé de saler les aliments lors de la première année de vie car c’est un possible facteur de risque d’hypertension artérielle à l’âge adulte. L’introduction d’acides gras polyinsaturés à longues chaînes pourrait à l’inverse avoir un effet bénéfique sur la santé cardiovasculaire.

Recommandations

Actuellement, il est recommandé pour tout nourrisson sans antécédent et né à terme de :

Débuter la diversification entre 4 et 6 mois, sur les conseils du médecin qui suit l’enfant, en insistant sur le fait qu’il n’y a aucune justification nutritionnelle à débuter avant 6 mois, mais qu’il ne faut pas débuter après 6 mois. Durant cette période, le moment de la diversification est choisi en fonction des compétences de l’enfant et de son intérêt pour la nourriture et des habitudes familiales.

Poursuivre l’allaitement maternel pendant et après la diversification.

— Ne pas retarder la diversification alimentaire pour les enfants à risque allergique au-delà de 6 mois, y compris pour les aliments les plus allergisants (œuf, poisson, arachide, blé, etc.).

— Il n’y a pas de période idéale pour l’introduction du gluten en termes de prévention de la maladie cœliaque et du diabète de type 1. Quel que soit l’âge choisi pour l’introduction du gluten (jamais avant 4 mois), celle-ci doit être débutée par de faibles quantités.

Apports alimentaires entre 6 et 12 mois

Alvisi et al. rappellent les apports énergétiques recommandés entre 6 et 12 mois (2) :

— Calories totales : 70 à 80 kcal/kg/jour.

— Apports liquidiens : 100 ml/kg/jour.

— Apports en glucides : entre 45 et 60 % des apports caloriques journaliers. Il est préférable d’apporter des sucres sous forme de féculents (pomme de terre, pâtes, riz, céréales, etc.) et d’éviter les sucres simples (jus de fruits, sucre, sucreries).

— Apports en lipides : 40 % des apports journaliers caloriques totaux. Ils ne doivent pas être inférieurs à 25 %. D’un point de vue qualitatif, les graisses d’origine animale doivent être limitées, et les graisses polyinsaturées d’origine végétale ou de poisson doivent être préférées. Les acides gras polyinsaturés à longues chaînes (huiles, poissons) doivent être introduits dans l’alimentation, les apports recommandés étant de 250 mg/jour.

— Apports protéiques : 10 % des apports caloriques journaliers, cela correspond à environ 1,1 g/kg/jour.

— Des apports quotidiens en légumes, fruits et fibres sont recommandés.

— Vitamines et minéraux :

– vitamine D : 400 UI/jour

– calcium : 260 mg/jour

– sel : 0,4 g/jour

– fer : 7 mg/jour.

Ces recommandations italiennes sont similaires aux recommandations européennes (4-5) et françaises (6), à l’exception du calcium pour lequel les recommandations françaises conseillent 500 mg/j.

POUR EN SAVOIR PLUS

1. Turck et al. Diversification alimentaire : évolution des concepts et recommandations. Archives de Pédiatrie 2015 ; 22 : 457-460.
2. Alvisi P et al. Recommendations on complementary feeding for healthy, full-term infants. Ital J Pediatr 2015 ; 41 : 36.
3. Redsell SA et al. Systematic review of randomised controlled trials of interventions that aim to reduce the risk, either directly or indirectly, of overweight and obesity in infancy and early childhood. Matern Child Nutr. 2015 Apr 20.
4. Braegger C et al. Vitamin D in the healthy paediatric population: a position paper by the ESPGHAN Committee on Nutrition. J Pediatr Gastroenterol Nutr 2013 ; 56 : 692-701.
5. Domellöf M et al, for the ESPGHAN Committee on Nutrition. Iron requirements of infants and toddlers. J Pediatr Gastroenterol Nutr 2014 ; 58 : 119-29.
6. Martin A. Apports nutritionnels conseillés pour la population française. Collection TEC&Doc, 3e édition, 2001.