Les conclusions d’une étude de cohorte chez des jumeaux
Il existe un caractère génétique pour certains paramètres de l’appétit. C’est ce que démontre cette étude réalisée en Grande-Bretagne sur une cohorte de près de 2 400 paires de jumeaux, la première de cette envergure réalisée chez le nourrisson.
Les traits phénotypiques définissant l’appétit semblent être modulés par des facteurs génétiques, aussi bien chez l’enfant que chez l’adulte. Le rôle d’un gène, le gène FTO, a ainsi été identifié dans le contrôle de l’appétit et de la satiété au niveau de l’hypothalamus.
Très peu de données étaient jusqu’alors disponibles chez le nourrisson.
Le principe de l’étude GEMINI
Pour déterminer le caractère génétique de l’appétit chez les nourrissons, une équipe anglaise a ainsi étudié une population de jumeaux, tous nourris de la même manière, au lait infantile, avant même que d’autres aliments ne soient introduits.
Les bébés étudiés faisaient partie de la cohorte Gemini Study (Gemini-Health and Development in Twins), mise en place au Royaume-Uni chez des enfants nés en 2007, avec pour objectif d’évaluer l’influence des différents aspects environnementaux et génétiques sur la croissance des enfants de la naissance jusqu’à l’âge de 5 ans.
Au total, 729 paires de jumeaux monozygotes (génétiquement identiques et partageant le même environnement) et 1 605 paires de jumeaux dizygotes (génétiquement différents et partageant le même environnement) ont été retenus pour l’analyse.
La mesure de l’appétit des bébés
La mesure de l’appétit des enfants a été réalisée pendant les premiers mois de vie, à partir de 4 items du questionnaire spécifique BEBQ (Baby Eating Behavior Questionnaire), ciblant la période de nutrition lactée exclusive. Les items ont été cotés sur une échelle de 1 à 5 par les parents :
– plaisir de manger,
– réactivité à la nourriture,
– satiété,
– et vitesse de prise du biberon.
La relation entre les réponses à ce questionnaire et la contribution génétique (selon le calcul d’un “ratio d’héritabilité”) a ensuite été mesurée dans les groupes monozygotes et dizygotes, après ajustement des données pour le sexe et l’âge des enfants.
Les conclusions de l’étude
L’influence de la génétique est modérée sur les items “plaisir de manger” (probabilité “d’héritabilité” de 53 %) et “réactivité à la nourriture” (59 %). De même, l’influence de l’environnement joue peu sur ces deux critères. En revanche, cette étude fait nettement ressortir la part de la variance génétique sur la “vitesse d’alimentation” (84 %) et la “satiété” (72 %). On note aussi que la vitesse d’alimentation est peu influencée par l’environnement.
L’influence particulièrement importante de la génétique sur la vitesse de prise des biberons serait, pour les auteurs, un indice précurseur de forte motivation devant la nourriture, comportement que l’on sait lié au risque d’adiposité précoce chez l’enfant et d’obésité ultérieure.
Ainsi, nos gènes pourraient avoir un rôle dans la régulation de l’appétit dès le plus jeune âge, avant même qu’une alimentation diversifiée ne soit introduite.
RÉFÉRENCE
Llewellyn CH, van Jaarsveld CHM, Johnson L et al. Nature and nurture in infant appetite: analysis of the Gemini twin birth cohort. Am J Clin Nutr 2010 ; 91 : 1172-9.