Nutriments Revue #2

Les propriétés de la vitamine D ont longtemps été limitées à son effet sur le métabolisme osseux. Des publications récentes montrent que la vitamine D joue aussi un rôle d’hormone, avec un impact sur de nombreuses fonctions de l’organisme.

La vitamine D est une vitamine liposoluble. 80 % des apports proviennent de la transformation cutanée du 7-déhydrocholestérol en vitamine D3, sous l’action des rayons solaires UVB. Les 20 % restants proviennent des apports alimentaires. Les aliments qui en contiennent sont principalement les poissons gras : saumon, morue, maquereau, sardine, hareng…

La vitamine D existe sous deux formes :

  • une forme de stockage, la 25-OH vitamine D3 (25(OH)D) ;
  • une forme active, la 1,25-OH2 vitamine D3 (qui est une hormone stéroïde).

Le passage de la forme de stockage en forme active se fait sous l’action d’une enzyme d’origine rénale, la 1a-hydroxylase.

Les “autres propriétés” de la vitamine D évaluées

L’action de la vitamine D sur la minéralisation osseuse est connue de longue date. Une carence en vitamine D est à l’origine du rachitisme dit “carentiel” chez l’enfant, et de l’ostéomalacie chez l’adulte.
Récemment, de nombreuses publications ont étudié son rôle dans diverses pathologies infectieuses, auto-immunes ou cancéreuses. Ces études ont en particulier montré que les taux de vitamine D seraient inversement corrélés à une augmentation de la mortalité, toutes causes confondues.

Des publications très récentes et une revue de la littérature réalisée par une équipe lyonnaise (1) font le point sur ces propriétés pléiotropes de la vitamine D.
Le rôle du déficit en vitamine D sur l’incidence des infections, essentiellement respiratoires, a été mis en évidence chez des nourrissons (bronchiolites notamment) et chez l’enfant (2, 3), et des études in vitro et chez l’animal ont mis en évidence une action sur le système immunitaire (2) et un effet sur le développement pulmonaire (4).

Un déficit fréquent en vitamine D

Le déficit en vitamine D est fréquent dans les populations européennes et américaines. Cette carence semble liée à différents facteurs : une faible exposition solaire, une alimentation pauvre en vitamine D dans les pays occidentaux et une augmentation de la prévalence du surpoids et de l’obésité (qui ont un impact sur le métabolisme de la vitamine D) (2).

Parmi les études récentes, la grande cohorte américaine NHANES chez 6 275 enfants et adolescents rapporte 9 % de déficit en 25(OH)D (5). Et une autre étude américaine de 2010, réalisée chez 173 nourrissons âgés de 6 à 19 mois (6), allaités, nourris au lait infantile ou au lait de vache enrichi en vitamine D, montre que 3 % avaient un taux de 25(OH)D < 27,5 nmol/l, signe de déficit, 8 % < 50 nmol/l et 28 % < 75 nmol/l ; ce déficit était significativement plus élevé dans le cas de l’allaitement maternel exclusif (p < 0,001).

Les recommandations chez le nourrisson et l’enfant en bas âge

En France, les préparations lactées pour nourrisson et de suite doivent toutes contenir de la vitamine D (entre 1 et 2,5 μg/100 kcal, sous forme de cholécalciférol, soit entre 40 et 100 UI/100 kcal) (7).

Cependant, la prescription par le médecin d’une supplémentation reste nécessaire chez le nourrisson et le petit enfant (1, 8) :

  • de 0 à 18 mois : les apports pour le nourrisson allaité sont de 800 à 1 000 UI/j (le lait maternel est en effet pauvre en vitamine D et les femmes allaitantes sont fréquemment carencées) ; pour les nourrissons nourris avec des laits infantiles, la supplémentation est de 400 à 800 UI/j ;
  • de 18 mois à 5 ans, la supplémentation est poursuivie à la dose de 1 000 UI/j ou de 100 000 UI tous les 3 mois.
  • Puis, jusqu’à la fin de l’adolescence, il est conseillé d’apporter une dose unique de 100 000 UI au début de l’hiver.

En conclusion

De plus en plus de travaux suggèrent que la vitamine D aurait un rôle positif dans diverses pathologies, en particulier infectieuses. La surveillance de la supplémentation en vitamine D, voire la recherche d’un déficit grâce aux dosages sanguins, sont aujourd’hui des éléments clés de la nutrition de l’enfant.

POUR EN SAVOIR PLUS

1. Bacchetta J, Ranchin B, Dubourg L et al. Vitamine D : un acteur majeur en santé ? Arch Pediatr 2010 ; 17 : 1687-95.
2. Walker VP, Modlin RL. The vitamin D connection to pediatric infections and immune functions. Pediatr Res 2009 ; 65 (5 Pt 2) : 106R-113R.
3. Camargo CA, Ingham T, Wickens K et al. Cord-blood 25-hydroxyvitamin D levels and risk of respiratory infection, wheezing, and asthma. Pediatrics 2010 Dec. 27, Epub ahead of print.
4. Zosky GR, Berry LJ, Elliot JG et al. Vitamin D deficiency causes deficits in lung function and alters lung structure.Am J Respir Crit Care Med 2011 ; 183 : 1336-43.
5. Kumar J, Muntner P, Kaskel FJ et al. Prevalence and associations of 25-hydroxyvitamin D deficiency in US children: NHANES 2001-2004. Pediatrics 2009 ; 124 : 362-70.
6. Liang L, Chantry C, Styne DM et al. Prevalence and risk factors for vitamin D deficiency among healthy infants and young children in Sacramento, California. Eur J Pediatr 2010 ; 169 : 1337-44.
7. Arrêté du 11 avril 2008 relatif aux préparations pour nourrissons et aux préparations de suite, modifiant l’arrêté du 20 septembre 2000 relatif aux aliments diététiques destinés à des fins médicales spéciales (Directive 2006/140/CE).
8. Bocquet A, Bresson JL, Briend A et al. Alimentation du nourrisson et de l’enfant en bas âge. Réalisation pratique. Arch Pédiatr 2003 ; 10 : 76-81.