Comportement, Société Revue #1

Une étude BVA en “vraie vie”, réalisée en 2009 par le Syndicat Français des Aliments de l’Enfance (SFAE), apporte des enseignements très intéressants sur le comportement réel des parents face à l’alimentation de leur jeune enfant de moins de 3 ans, et met parfois en évidence un décalage avec leurs déclarations. Elle permet de définir une typologie des parents, utile en consultation pour adapter nos messages nutritionnels en prenant mieux en compte la réalité liée à leur psychologie, aux contraintes liées à leur mode de vie ou à leur savoir-faire…

Le SFAE réalise régulièrement des enquêtes destinées à approfondir les connaissances des pratiques et comportements dans l’alimentation du petit enfant. Cette étude ethnologique BVA a débuté par une phase qualitative visant à étudier, via une analyse croisée des comportements et discours, les différents profils de parents et les motivations sous-jacentes.

La méthodologie

30 foyers ayant un enfant de 6 mois à 3 ans ont été recrutés.
Après des entretiens, des caméras vidéo miniatures et enregistreurs numériques ont été disposés en fonction de leurs habitudes. Les enregistrements ont été faits au moment des repas sur 8 j (2 j de semaine, un mercredi, un jour de week-end) avec recommandation de maintenir ses habitudes.
L’analyse de ces enregistrements à partir de grilles d’observation (phénomènes comportementaux et interactionnels, types d’ingrédients, matériels utilisés…) a été suivie d’entretiens semi-directifs des parents, avec possibilité de les soumettre aux images.

5 profils types

Les parents poules

La père participe, mais la mère garde le contrôle des repas. Elle a une bonne connaissance nutritionnelle. Si la santé est importante, elle inclut aussi les dimensions de plaisir, d’autonomie du bébé. Elle est sûre de bien faire, cuisine volontiers, avec un écueil : en faire trop (ajout de beurre, crème, pâte à tartiner…). C’est sur ce point qu’un rappel des “normes” sera utile.

Les initiateurs

Pour eux, apprentissage et autonomie sont essentiels. Les repas sont organisés sur le mode du partage. Ils sont plutôt informés des “normes” et sont sûrs de bien faire. Plutôt active, la mère est sereine, privilégie le côté pratique (micro-ondes…) et sait allier fait-maison et aliments infantiles. Il sera parfois utile de recadrer les apports (on goûte de tout, y compris les frites…).

Les pragmatiques

Le père est peu présent, la mère, très investie dans la gestion de la maison, va à l’efficacité plus qu’au plaisir : le bébé doit être vite autonome. Les repas : du pratique et du facile. En toute bonne foi, si elle établit des règles strictes (pas de sucreries…), elle fait de nombreux écarts nutritionnels alors qu’elle est sûre de bien faire (plats “adultes”, fast-food réunissant nourriture et distraction, faux fait-maison à base de produits industriels…). Un bon usage des aliments infantiles, permettant des apports adaptés, peut être une solution pour elle..

Les résignés

Pour eux, le repas est une nécessité, ils veulent éviter les conflits : au final, c’est l’enfant qui décide, avec de nombreux écarts (grignotage, friandises, plats surgelés, fast-food…). Ces parents, qui pensent mal faire, sont souvent en situation d’échec, méritent une consultation un peu plus approfondie pour être rassurés et informés de l’importance d’apports nutritionnels adaptés chez le tout-petit, assortis de conseils pratiques sur le fait-maison et les aliments infantiles.

Les inquiets

Si le père est présent, c’est la mère qui s’occupe presqu’exclusivement des repas. Elle a une bonne culture alimentaire et la volonté de (trop) bien faire, de contrôler, avec le risque d’un face à face angoissant, d’une attitude un peu rigide qui entraîne des écarts (surdosage, grignotage, gavage) pour contenter son enfant. En déficit de confiance en eux, ils doivent être rassurés et réorientés vers les bonnes pratiques nutritionnelles, en les guidant sur un bon usage du fait-maison et aliments infantiles.

Au total

Lors des entretiens, la majorité des parents sont persuadés d’agir au mieux et de pouvoir prendre quelques distances par rapport à la norme. Les entretiens ont mis en évidence des écarts alimentaires – rations trop importantes, ajouts (sel, crème, sauce…), plats “adultes”, faux fait-maison (frites) – qui soulignent une réelle méconnaissance diététique. En pratique, les parents ne font pas toujours ce qu’ils disent… Il nous faut donc adapter notre discours à cette légitimité parentale (« Je sais ce qui est bon pour mon enfant »), sans culpabiliser, en tenant compte de la réalité, de leur disponibilité : allier le côté “nutritionnellement correct” et le côté pratique (bon usage du “vrai” fait-maison, et des aliments infantiles dont la composition est bien adaptée aux besoins du petit enfant).