Une étude allemande établit des guidelines et conclut à la nécessité de supplémenter en fer, iode et vitamine D malgré une alimentation équilibrée
Les principes alimentaires de base doivent exister pour favoriser une alimentation équilibrée dès le plus jeune âge. Cependant, elle n’exclut pas les supplémentations qui peuvent être parfois indispensables comme celles en vitamine D, en iode et en fer. En effet, il est constaté, pour les enfants de moins de 3 ans, des apports insuffisants pour cette vitamine et ces 2 minéraux.
On considère généralement des apports alimentaires “suffisants” comme des apports alimentaires qui correspondent aux valeurs d’apports de référence par nutriment. Récemment l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) a identifié des nutriments dits « critiques », car les apports moyens en Europe sont souvent inférieurs aux recommandations. Il s’agit du fer, de l’iode et de la vitamine D.
Difficulté de contrôler l’apport quotidien en nutriments
Cependant, au jour le jour, il n’est pas toujours facile de savoir quelle quantité de nutriments les personnes consomment, car on mange une combinaison d’aliments différents et les sources de nutriments sont multiples.
Une équipe allemande vient de proposer une technique pas-à-pas d’évaluation de la nutrition des nourrissons et jeunes enfants.
Cette approche est basée sur 2 étapes :
1) le développement par pays de guidelines alimentaires avec identification d’aliments largement consommés pouvant répondre aux besoins nutritionnels dans la population.
2) examen des patterns alimentaires « critiques » déviant de ces guidelines, comme dans des familles où des groupes d’aliments sont exclus des repas. Cela concerne notamment des familles végétariennes ou de condition sociale ou économique précaire pour lesquelles l’alimentation est contrainte et/ou incertaine.
Traduire les recommandations en guidelines compréhensibles par le grand public.
Le principe de l’étape 1 consiste à traduire les recommandations classiques d’apports en nutriments en guidelines nutritionnelles courtes et compréhensibles pour le public. Ces recommandations doivent prendre en compte les problèmes de santé, les habitudes alimentaires et considérer une alimentation globale et pas seulement des groupes alimentaires. Du fait de différences culturelles, elles doivent être propres à chaque pays et différentes en fonction des groupes d’âge, notamment pour le nourrisson et l’enfant.
Un trop faible apport de fer, d’iode et de vitamine D chez les enfants allemands
L’équipe de recherche a appliqué ce principe aux habitudes de consommation allemandes. Il en ressort que la plupart des besoins sont bien couverts par ces guidelines en dehors du fer, de l’iode et de la vitamine D pour lesquels les apports sont en-deçà des recommandations.
Pour la vitamine D, on note que tant que l’enfant reçoit une supplémentation médicamenteuse, le statut en 25(OH) D est normal. Après, le défaut d’exposition solaire associé à des apports alimentaires peu riches en vitamine D conduit à une diminution importante du dosage sanguin en vitamine D. La société allemande de pédiatrie conseille de poursuivre la supplémentation systématique si l’enfant est peu exposé au soleil.
Il n’existe pas de biomarqueur du statut en iode pour les nourrissons et les jeunes enfants. Chez l’enfant plus grand, des dosages de 24 h ont montré des quantités faibles d’iode, potentiellement à cause d’une utilisation non systématique du sel iodé dans l’industrie alimentaire. De plus, il est déconseillé de saler l’alimentation du très jeune enfant. De ce fait, les nourrissons ne bénéficient pas des stratégies de prévention de la carence en iode par l’utilisation de sel iodé. La supplémentation en iode des aliments pour nourrissons paraît indispensable surtout dans des régions éloignées de la mer.
La prévalence de la carence en fer dans la population européenne en fonction du type d’alimentation est encore sujette à débat. En cas de facteurs de risque de carence martiale, il semble légitime de la rechercher, mais une supplémentation en fer systématique n’est pas recommandée.
Examen des habitudes alimentaires critiques
Plusieurs habitudes alimentaires dites « critiques » ont été identifiées. Les diètes végétariennes (5 à 6 % des enfants dans la population allemande) qui excluent les aliments d’origine animale sont souvent considérées comme plus « saines », car moins riche en acides gras saturés, sucres raffinés et sels et plus riches en fibres, antioxydants, etc. Cependant, le risque de carence en fer, iode et vitamine D semble plus élevé dans ces populations. De plus, des carences sévères (en vitamine B12, omégas 3, calcium, etc.) ont été rapportées chez des enfants avec des diètes très strictes, végétaliennes ou macrobiotiques.
En Europe, plus le niveau socio-économique est bas, plus le risque de surpoids et d’obésité est important. De même, l’allaitement maternel est moins fréquent quand le niveau d’éducation de la mère est bas. Concernant la qualité de la nutrition, les produits type fruits et légumes sont moins consommés et les aliments riches en sucres raffinés et graisses saturées le sont plus. À l’inverse, il semble que la consommation de lait ne soit pas différente dans les différentes classes sociales. Au total, il n’est pas établi un risque de carence accru en fonction du niveau socio-économique, même si la qualité nutritionnelle des aliments est souvent moins bonne en cas de difficultés financières des familles.
Conclusion
Au total, cette étude allemande souligne qu’il est possible de décrire des patterns de consommation alimentaire et de mettre en évidence des risques de carences, notamment pour le fer, l’iode et la vitamine D. L’importance de la supplémentation systématique des enfants en vitamine D est reconnue et une alimentation enrichie en iode paraît nécessaire. Concernant les risques de carence martiale, le consensus actuel est de la dépister au cas par cas.
RÉFÉRENCE
Kersting M, Alexy U, Schürmann S. Critical Dietary Habits in Early Childhood : Principles and Practice. World Rev Nutr Diet 2016 : 115 : 24-35